Le Québec choisit-il bien ses immigrants pour le marché du travail?
En pleine pénurie de main-d’œuvre, le Québec aurait avantage à mieux choisir ses 30 000 immigrants économiques reçus chaque année pour pourvoir ses 1,3 million de postes d’ici 10 ans, plaident des acteurs.
«On se demande si on ne vit pas sur une autre planète. Pourquoi on ne fait pas le choix de prioriser les diplômés en sciences infirmières à l’étranger, par exemple?», se demande l’associé chez EXO Avocats, Marc-André Séguin.
Au moment où la détresse ronge les infirmières en surcharge de travail, M. Séguin critique Québec qui accorde deux fois plus de points dans sa nouvelle grille de sélection à un immigrant diplômé en «gestion d’un établissement de restauration» au collégial… qu’à une infirmière formée au baccalauréat à l’étranger.
«Quand on prend la liste et que l’on constate certains choix de politiques publiques, on se demande si c’est vraiment arrimé aux besoins de l’économie du Québec», insiste l’avocat, irrité par les choix gouvernementaux.
«Fondamental pour l’économie»
«J’imagine qu’un nouveau gouvernement va se concentrer là-dessus quand il arrivera au pouvoir», pense aussi le président-directeur général de la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ), Stéphane Forget.
Même s’il salue le fait que Québec a mis fin au système d’immigration de «premier arrivé, premier servi», M. Forget dit qu’il faut modifier la grille de sélection parce qu’elle n’est pas adaptée à nos besoins de main-d’œuvre. «C’est fondamental pour l’économie», dit-il.
La porte-parole nationale de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), Martine Hébert, rappelle que la moitié des postes à pourvoir dans les PME sont ceux de manœuvre avec des compétences de base.
«Quelqu’un qui a un doctorat en sociologie à l’Université de Marrakech n’ira pas s’installer en région pour emballer des salades dans une usine», observe Mme Hébert.
Au moins, Québec s’est engagé à revoir sa grille de sélection dans sa stratégie nationale sur la main-d’œuvre, conclut-elle.
Immigration économique
Immigrants admis en 2017 | 52 388
Immigrants économiques en 2017 | 30 262
Travailleurs qualifiés | 24 862 – 82,2 %
Investisseurs | 4331 – 14,3 %
Aides familiaux | 811 – 2,7 %
Entrepreneurs | 222 – 0,7 %
Travailleurs autonomes | 36 – 0,1 %Provenance
Asie | 43,4 %
Afrique | 27,5 %
Europe | 15,8 %
Amérique | 13,1 %
Océanie | 0,2 %
Source: ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion
Ce que les partis proposent
Coalition avenir Québec
«Une régionalisation, une meilleure intégration avec un financement encore plus fort. […] Contrairement aux autres partis, un immigrant économique qui ne parle pas français, ce n’est pas grave s’il y a pénurie», estime le candidat de la CAQ dans Granby François Bonnardel. Vendredi, son chef s’est dit prêt à couper près de 40 % de l’immigration économique du Québec, soit 12 000 immigrants sur 31 000, si Ottawa n’accède pas à ses demandes.
Parti québécois
«Je crois qu’il faut revoir nos critères. […] Un, il faut bien comprendre quels sont nos besoins. Deux, une fois qu’on les a bien identifiés, il faut aller voir à l’étranger dans quels pays ils se trouvent. Nous, on ajoute la francisation», partage le candidat du PQ dans Saint-Henri-Sainte-Anne, Dieudonné Ella Oyono.
Parti libéral du Québec
«La grille doit évoluer pour tenir compte davantage des besoins réels des entreprises, notamment de ceux en région, qui sont grandissants», dit le candidat libéral dans Charlesbourg François Blais, qui rappelle que les immigrés québécois sont plus présents sur le marché du travail que les Québécois nés ici, toute proportion gardée, depuis l’an dernier.
Québec solidaire
«Il faut accélérer de façon importante la reconnaissance des diplômes et des compétences par un cadre uniforme, par l’augmentation des sages en milieu de travail et par le microcrédit […]. C’est un parcours du combattant de les faire reconnaître», déplore Andrés Fontecilla, candidat de Québec solidaire dans Laurier-Dorion.
Immigrants en emploi
Le débat sur le nombre d’immigrants est un faux débat pour plusieurs. Pour la porte-parole nationale de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), Martine Hébert, peu importe que le Québec en reçoive 40 000, 50 000 ou même 60 000… l’important, c’est qu’ils répondent aux besoins économiques de la province. Rappelons que plus de 44 % des immigrants en emploi au Québec sont surqualifiés.
Immigrants investisseurs
Québec doit revoir son programme d’immigrants investisseurs parce que près de 90 % d’entre eux, majoritairement d’origine chinoise, désertent le Québec pour aller à Toronto ou à Vancouver. Pour cette raison, le gouvernement aurait intérêt à aller chercher plus d’investisseurs de pays francophones, estime le professeur titulaire à l’École de relations industrielles de l’Université de Montréal, Brahim Boudarbat.
Besoins en immigration économique
Même si elles ont besoin d’eux, les PME sont parfois réticentes à embaucher des immigrants, selon une étude la Banque de développement du Canada (BDC). Nos entreprises vont souvent préférer embaucher des jeunes ou des retraités, ou même offrir de meilleurs salaires ou même changer leur image avant de se tourner vers la main-d’œuvre immigrante.
Tva Nouvelles
#marché du travail au québec #les tendances du marché du travail #segmentation du marché du travail